Depuis que le Québécois est arrivé, les Aigles ont pris de la hauteur. Ils s’envoleront samedi à Zoug avec de grosses ambitions
S’il a débarqué, à la fin de janvier, sur la pointe des pieds, depuis qu’il est arrivé, Francis Paré s’est envolé. Ou plutôt, c’est l’Aigle, avec ce Québécois de 29 ans (11 points en 8 matches), qui a repris des couleurs et de la hauteur. Les Grenat, qui ont enchaîné cinq succès en six matches, visent désormais les sommets. C’est à Zoug, avec des rêves plein la tête, que va commencer ce grand voyage vers le titre, cette montagne qui se veut toujours inaccessible pour les Genevois. «Mais avec l’apport de Goran Bezina, qui est un leader né dans le vestiaire, et le retour des blessés, je ne suis pas le seul à avoir contribué à cette métamorphose, sourit le sniper canadien. C’est tout le groupe qui a retrouvé confiance, prêt pour cette vraie saison qui prend enfin son envol.»
Francis Paré, que connaissez-vous de Zoug, équipe que vous n’avez jamais rencontrée?
Je connais David McIntyre, pour avoir joué contre lui en Finlande et à ses côtés avec le Team Canada durant la Coupe Spengler. C’est le joueur qui peut, avec son talent offensif et défensif, changer un match très facilement. Mais si on continue de marquer autant de buts tout en préservant notre bon système défensif, on peut créer de belles surprises ce printemps.
Les Zougois vont aussi apprendre à vous connaître…
J’imagine! Il est vrai que peu de personnes me connaissaient avant que je n’arrive à Genève. Je n’étais pas un «moins que rien», mais presque. Il y a des gens qui me demandaient qui j’étais alors que j’ai quand même réussi une belle carrière en KHL. Je repars donc de zéro et c’est une belle chance pour moi de prouver que je peux réussir de belles choses aussi en Suisse.
Et si vous refaisiez le coup de 2014, où, à peine débarqué à Magnitogorsk, vous remportiez le titre de KHL?
Pourquoi pas ici, en effet! Quand j’ai posé mes valises dans cette région de Russie, je ne connaissais pas un seul joueur et je peux affirmer aujourd’hui que tous ces gars-là que j’ai côtoyés, ce sont les meilleurs au monde, ils pourraient tous évoluer en NHL! Personne ne parlait à ce moment-là de remporter le championnat et on a gagné le titre au 7e match contre Prague. Je n’oublierai jamais cet instant de folie, c’est gravé dans ma tête à jamais et ce serait vraiment fantastique de le refaire ici.
Mais avec Goran Bezina, vous êtes venus de Zagreb pour aller chercher ce trophée, n’est-ce pas?
On veut toujours gagner. C’est pour cela que l’on joue au hockey. Tout le monde se rappelle des gagnants, jamais des finalistes. J’ai mon nom gravé sur la coupe de KHL. Chez moi, j’ai aussi une réplique du trophée et à chaque fois que je la regarde, je ne l’embrasse pas mais je me retiens. Quand tu gagnes, n’importe où, c’est un feeling indescriptible. Ce n’est pas la Coupe Stanley, mais pour en avoir parlé avec Romy, qui avait décroché le titre en Suisse, on s’en souvient toute une vie.
Les play-off, c’est une nouvelle saison qui commence. Comment vivez-vous cette période si particulière?
En prenant un match après l’autre, car on ne peut pas aller plus vite! Que tu perdes 7-0 ou que tu gagnes 8-1, c’est un seul point. Le lendemain, tu te réveilles et tu apprends de tes erreurs pour continuer. Et si tu penses après une grosse victoire que tu es bon, tu es mort. Une série, ça va très vite. Que ce soit 3-0 d’un côté ou de l’autre, tu ne peux jamais te permettre un relâchement, sinon tu vas le payer. Pour gagner, il faut tout donner et même plus. Les gars doivent jouer tous les matches avec une attitude de champion. Genève attend cette consécration depuis des années, on va tout faire pour soulever la coupe d’ici à quelques semaines. Ces dernières semaines, quand on a décidé de jouer tous ensemble, nous n’étions pas loin d’être infaillibles, avec quatre victoires d’affilée. C’est la période de l’année où il s’agit d’être chaud, à nous de jouer maintenant.
La couche de Rose…
Francis Paré avoue que lorsqu’il était plus jeune, il avait un peu plus de peine à contrôler ses émotions durant les play-off. «Mais ma fille, Rose, qui a 5 mois, m’a aidé, sourit le Canadien. Quand je suis à la patinoire, c’est le business, et une fois de retour à la maison, que j’aie marqué cinq points ou effectué un mauvais match, on a besoin de moi pour lui changer sa couche. Du coup, cela me change les idées.» Si sa femme, Daisy, sait, avec les années, qu’il a besoin de plus d’attention et de sommeil pendant cette période, le couple essaie, ensemble, de trouver le juste milieu. «Elle est assez intelligente pour comprendre que lors des séries, le hockey passe en premier, qu’un titre ne s’obtient pas en claquant les doigts, confie-t-il. Je suis vraiment chanceux de l’avoir auprès de moi.»
C’est pour elle et sa fille aussi qu’il a décidé de renoncer à se laisser pousser la barbe comme Eliot Antonietti. «Quand je l’ai vu, j’avais envie de lui ressembler, mais après quelques semaines, en voyant que je n’y arriverais pas, j’ai préféré, après le regard de mes femmes, d’abandonner le projet. Aujourd’hui, elles me sourient à nouveau…»
Francis Paré est heureux et cela se voit. Il se plaît bien à Genève. «Il y a de bons restaurants et c’est vraiment beau, commente-t-il. On est bien traité. Que demander de plus?» Une reconduction de contrat avec les Aigles? «J’ai rencontré récemment mon agent et pour l’instant, je n’ai reçu aucune offre, avoue-t-il. Mais je n’ai pas envie de sauter une étape. Je souhaite juste me concentrer sur ce premier match à Zoug et ramener la victoire.» Il est prêt à faire trembler les filets. Chaque chose en son temps…