Le secteur offensif de GE Servette? Sept joueurs de centre pour seulement quatre places. Six ailiers pour huit postes à pourvoir. Cherchez l’erreur… Et si tout n’était que question d’équilibre, finalement? L’équilibre entre une défense robuste et une offensive percutante. Entre la palette de joueurs à disposition, et leur positionnement adéquat sur la glace. Il faut de tout pour faire une (bonne) équipe. Des artistes, des créatifs, des besogneux, des hargneux, des consciencieux, et même des fous furieux. Il y a tout cela à GE Servette, c’est certain. Et pourtant cela ne tourne pas rond, ces derniers temps, chez les «grenat»: cinq défaites de rang en championnat, une sixième si l’on prend en compte le revers concédé face à Kloten au stade des demi-finales de la Coupe. Extrêmement décevant.
La mauvaise phase des Aigles coïncide étrangement avec les arrivées (ou plutôt les retours) aux Vernets de Matthew Lombardi et Cody Almond, deux des fers de lance de la saison passée. Un coup d’œil aux statistiques, qui ne mentent pas pour le coup: GE Servette n’a gagné qu’une seule fois depuis que Cody Almond a rejoint l’équipe (c’était lors de son premier match contre Ambri aux Vernets), aucune avec Lombardi. Un peu comme si l’équilibre d’un groupe, qui n’était certes pas flamboyant mais alignait tout de même les bonnes performances en leur absence, avait soudainement été chamboulé.
Aujourd’hui, GE Servette est une équipe qui ne penche ni à droite ni à gauche, mais qui souffre indiscutablement d’un embouteillage au centre. Il y en a sept, et pas des moindres, pour quatre places seulement: Kevin Romy, Matthew Lombardi, Tom Pyatt, Cody Almond, Noah Rod, Timothy Kast et Chris Rivera! Rarement une équipe n’aura été aussi bien fournie à cette position dans l’histoire du hockey suisse. Sauf que, dans la pratique, plusieurs centres naturels sont (ou seront) contraints de s’exiler sur les côtés, à une position où ils se sentent forcément un peu moins à l’aise et beaucoup plus à l’étroit. Un peu moins à l’aise (pas grave), mais suffisamment pour être un tout petit peu moins bon sur la glace. Le hockey tel qu’il est pratiqué aujourd’hui dans ce championnat hautement compétitif ne tolère malheureusement plus ce qui est «un petit peu moins bien». Les Fribourgeois, soit dit en passant, en savent quelque chose…
Bien sûr, il n’est pas sorcier pour un centre de jouer à l’aile. L’inverse est beaucoup plus compliqué, car ce poste exige une conscience défensive irréprochable, un sens tactique plus aiguisé, et cette volonté (et capacité aussi) à assumer le rôle de plaque tournante d’une ligne. Le centre est plus «intellectuel» que l’ailier. Son rôle, sans vouloir être réducteur, lui demande de réfléchir davantage. Cody Almond, par exemple, n’éprouvera aucune difficulté à évoluer sur les côtés (ce qui est le cas actuellement). Mais, dans la pratique, il est plus efficace lorsqu’il évolue à sa position de prédilection. Idem pour Noah Rod: le supertalent de 18 ans a toujours patiné au milieu depuis son arrivée à Genève (en juniors puis avec la première équipe). Chris McSorley, qui a toujours tenu, jusqu’ici, à l’aligner au cœur du jeu (pour ses qualités de travailleur, sa présence physique et sa conscience défensive), l’a pourtant repositionné à l’aile – comme avec la Suisse M20 par ailleurs – pour faire de la place à Matthew Lombardi. Une façon, sans doute, de redonner des jambes au Canadien, à la traîne depuis qu’il a troqué le maillot des New York Rangers contre celui de GE Servette. En l’état actuel, Lombardi a plus que quiconque besoin de «puncheurs» à ses côtés (Rod et Jacquemet).
Au final mieux vaut avoir l’embarras du choix, c’est vrai. L’abondance de centres est moins néfaste que l’inverse. Pas surprenant si toutes les équipes de NHL couronnées ces dernières années (Los Angeles, Chicago, Boston) étaient de loin les mieux armées à ce poste stratégique. A Chris McSorley, désormais, de démontrer que trop, c’est nettement mieux.