1er décembre 2017

L’État de Genève a fait un pas dans la direction des investisseurs prêts à s’engager au Trèfle Blanc. Il est insuffisant pour assurer l’avenir du GSHC, détenu par le Canadien.

 

La subtilité n’était pas évidente à déceler à la première lecture du communiqué de presse envoyé hier par l’État de Genève. Elle sera sans doute considérée par les investisseurs comme un petit pas supplémentaire effectué dans leur direction. L’auteur du communiqué est le Conseil d’État in corpore, et pas seulement le comité de pilotage (COPIL) du projet, qui regroupe trois départements. L’exécutif cantonal parle d’une même voix, c’est déjà ça.

 

Des points positifs

 

Deux autres éléments n’auront pas échappé aux bailleurs de fonds. L’appel d’offres, exigé depuis juin par les collectivités publiques pour aller de l’avant dans ce projet désormais 100% privé, n’est plus jugé indispensable. «Le Conseil d’État entre en matière sur l’étude d’une telle proposition», peut-on lire. C’est justement cet appel d’offres, considéré comme un nouveau concours d’investisseurs par les promoteurs, qui avait provoqué leur montée aux barricades. Second point positif: les services de l’État se sont déclarés prêts à rencontrer prochainement leurs interlocuteurs, «afin de clarifier les différentes problématiques». À notre connaissance, le Département des finances avait plusieurs fois ignoré les appels du pied des investisseurs ces dernières semaines, à leur plus grand désarroi.

 

Contacté pour qu’il nous livre son sentiment sur cette prise de position du Conseil d’État, Me François Bellanger, membre du conseil d’administration du GSHC, a répondu: «Le club se réjouit de cette avancée. Il souhaite travailler le plus rapidement possible avec les collectivités publiques afin de pouvoir construire le meilleur projet pour Genève, le hockey de haut niveau et les Genevois.»

 

Pas un feu vert

 

Bémol: ces quelques pas effectués par l’État en direction des investisseurs ne constituent pas un feu vert, ni même une lettre d’intention émanant des autorités. À notre connaissance, seul un engagement ferme pris par le Conseil d’État permettra le déblocage des 3 millions de francs dus au club détenu à 100% par Hugh Quennec. On le sent bien à la lecture du communiqué de presse, on est encore très éloigné du blanc-seing étatique.

 

Comme beaucoup de choses restent à faire, et dans un laps de temps que l’on exige très court du côté des promoteurs, il convient de continuer à s’inquiéter grandement pour GE Servette. À ce stade, le club de National League ne peut guère espérer récupérer rapidement ces fameux trois millions indispensables pour assurer son train de vie. Corollaire: tous les scénarios sur son avenir à court terme (lire ci-dessous) peuvent être envisagés.

 

La faillite

 

GE Servette HC SA l’a reconnu luimême le 21 novembre après les premières révélations du «Matin»: sa «trésorerie est tendue et pourrait se détériorer ces prochains mois si deux éléments ne sont pas résolus rapidement». Il y avait le versement de 500 000 francs dus par le canton à l’Association Genève Futur Hockey (AGFH) – argent avancé par le club pour régler les frais engendrés par l’encadrement de sa relève. Un projet de loi est en souffrance depuis juin au Grand Conseil, mais la conseillère d’État Anne EmeryTorracinta a expliqué avoir écrit à l’AGFH «pour procéder à une avance de trésorerie». Il y avait, surtout, les 3 millions de remboursement de frais avancés par le club, que les investisseurs de la nouvelle patinoire s’étaient engagés à ristourner si le projet se faisait rapidement. Depuis hier, la notion de rapidité peut être mise en doute. Corollaire: une faillite est envisageable.

Le coup de magie

 

propriétaire à 100% de l’organisation. Le règlement des factures liées au train de vie de son club est de son ressort. L’homme d’affaires canadien, que de nombreux Genevois imaginent sans le sou, n’a peut-être pas abattu sa ernière carte. Est-il capable de trouver une solution pour pallier l’éventuelle absence des 3 millions qui guette les caisses du club, que l’on sait quasi vides? Va-t-il trouver une âme charitable d’accord de l’aider à traverser cette mauvaise passe en attendant que l’État prenne une décision définitive en faveur du projet de nouvelle patinoire au Trèfle-Blanc, processus qui peut durer? Cette hypothèse n’est pas à exclure.

 

La patience

 

Malgré les menaces proférées la semaine passée, les investisseurs prêts à s’engager dans le projet ne vont pas forcément les mettre à exécution dans l’immédiat. Rassérénés par les propos qu’ils ont entendus hier – tout n’a pas besoin d’être révélé au grand public non plus –, ils sont d’accord de faire preuve d’un peu plus de patience. De toute manière et «à la connaissance du club», comme indiqué dans le communiqué de presse envoyé le 21 novembre, les factures sont toutes payées. Cela laisse donc un peu de temps et de marge de manoeuvre aux dirigeants servettiens et aux investisseurs. Il n’est pas exclu que ces derniers débloquent petit à petit l’argent qu’ils doivent au GSHC, dans l’espoir de voir l’État aller finalement dans leur sens.

 

La résurrection

 

C’est une certitude, «Jesus Chris» McSorley travaille en coulisses pour pouvoir venir en aide à GE Servette en cas de catastrophe. Selon nos informations, il a des investisseurs russes dans sa manche pour monter un projet de club ferme à Sion, travail qu’il a effectué avec la bénédiction de sa hiérarchie. Mais il en aurait aussi profité pour imaginer un plan B sous la forme d’un projet bis de nouvelle patinoire (voire de rénovation et d’agrandissement des Vernets?), qui pourrait remplacer celui porté en ce moment du côté du Trèfle-Blanc. Seulement, voilà, Hugh Quennec reste le propriétaire à 100% des actions du club. Et il va sans dire que le retour au premier plan de l’homme qui a façonné le GSHC au XXIe siècle semble difficilement conciliable sans un départ de son ancien partenaire en affaires. Départ qui ne se fera (ou pas) que si ce dernier se sent acculé, ce qu’il n’est pas encore.

 

 

Les fans genevois ont de quoi être anxieux

 

A ce stade, personne n’a perdu la face dans le projet de nouvelle patinoiredu Trèfle-Blanc. Ni l’État, qui  vient d’effectuer quelques pas en direction de ses éventuels partenaires pour les calmer. Ni les investisseurs, qui avaient menacé de quitter un navire en train de se perdre dans le brouillard, avec un gros trou dans la coque. Une lueur d’espoir continue à poindre donc.

 

Mais il convient de souligner qu’elle est vacillante, ce qui ne fait surtout pas l’affaire de GE Servette. C’est désormais devenu un secret de Polichinelle, l’état des finances du club de National League toujours piloté par l’incontournable Hugh Quennec est extrêmement préoccupant. Un assainissement de la situation est intimement lié à un feu vert rapide de l’État en faveur du projet imaginé sur la commune de Lancy.

 

Reste cette question toute bête: que veut dire rapide aux yeux des deux parties? On l’a bien senti, on parle désormais en semaines du côté d’investisseurs qui estiment que le projet a pris beaucoup de retard. Ils affichent de l’impatience et ils l’ont clairement fait savoir. Mais ce timing correspond-il à celui en vigueur dans les services d’un canton, qui plus est quand ceux-ci sont basés au bout du lac Léman, où tout paraît plus compliqué que partout ailleurs? De la réponse à cette question angoissante pour n’importe quel amoureux de GE Servette dépend l’avenir à très court terme de leur organisation fétiche. Il y a objectivement de quoi être anxieux.