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Goran McKim, mar 29/09/2015 - 14:02

Critiquée par certains, nous sommes convaincus de l’intérêt de la CHL. Voici pourquoi.

 

Si nos joueurs avaient réussi à passer un tour en Champions Hockey League, nous serions entrain de préparer notre déplacement pour aller les soutenir aux quatre coins de l'Europe. Malheureusement, c’est depuis Genève et sans perspective de nous prévoir un nouveau déplacement européen que nous écrivons ces lignes, nostalgiques d’une compétition que l’on aime et qui nous manque déjà.

 

On a à peu près tout entendu sur cette CHL, et notamment pas mal de commentaires négatifs de gens ne comprenant pas son intérêt ni sa raison d’être. Pour ma part, je me positionne plutôt dans le camp opposé : celui de ses fervents défenseurs. Cette compétition n’est certes pas parfaite, j’en conviens. Mais elle mérite de perdurer.

 

Avant d’essayer de disséquer les arguments des « anti-CHL », rappelons tout de même que le hockey sur glace est le seul sport collectif majeur qui ne possédait pas de compétition continentale, malgré un certain nombre de tentatives foireuses par le passé. Tentatives qui, entre nous soit dit, ne sont certainement pas innocentes dans le scepticisme entourant cette nouvelle mouture. Comment en effet se passionner pour une compétition qui en est à sa 18ème tentative ? Et pourtant, il se pourrait bien que ce format soit le bon.

 

Voici donc une liste (qui ne se prétend pas exhaustive) des arguments lus ou entendus en défaveur de la CHL, avec une tentative de les « contrer ».

 

On ne connait pas les adversaires

 

Vous devez avoir une vie passionnante si vous réagissez de la même manière dans la vie de tous les jours. On part donc du principe que tout ce qui est nouveau,  c’est de la merde ? Ou tout du moins pas intéressant ? Je trouve ça bien réducteur.

 

Pour ma part, je trouve ça tout ce qu’il y a de plus intéressant de rencontrer, autrement qu’en amical, des équipes nouvelles, sur lesquelles on n’a pas d’a priori, pas de têtes de Turcs. Découvrir de nouvelles têtes, de nouvelles façons de jouer, de nouveaux supporters en parcage.

 

Alors peut-être bien que les noms de nos adversaires potentiels sont moins sexy que les Barça, Real, Juve ou Bayern que l’on peut rencontrer en football. Mais de 1, si je veux voir ces clubs, je vais voir des matchs de foot, pas de hockey. De 2, je préférerai toujours voir le GSHC jouer en live contre n’importe quel club, même inconnu, que de me palucher devant deux équipes de foot à la TV, aussi prestigieuses soient-elles.

 

L’exemple du Sparta Prague n’est pas forcément le plus parlant vu que tout le monde connaissait ce club, mais la scène de fin de match (les joueurs tchèques qui saluent le public qui les applaudit chaleureusement), seule la CHL peut nous offrir ce genre de moment. Cela prouve en tout cas que ces matchs se disputent dans un climat tout autre que celui du championnat. C’est rafraichissant et réjouissant. Même si on ne connait pas les numéros de tous les joueurs d’en face par cœur.

 

Les déplacements sont trop lointains

 

95% du public genevois ne se déplace déjà pas au-delà de Berne/Langnau, donc finalement, Davos ou Prague, quelle différence quand on y va pas ? Critique qui ne fait aucun sens pour une bonne majorité de gens qui l’émettent.

 

Pour les joueurs par contre, la question pourrait se poser. Mais je vous la retourne : est-ce plus contraignant de faire 6h de car jusqu’à Lugano ou 2 d’avion jusqu’à Prague ou 3 jusqu’à Helsinki ?

 

En ne la jouant pas, on pourrait bien sûr s’éviter de se poser la question et cela ferait des jours de repos en plus. Mais les joueurs semblent apprécier cette compétition et d’effectuer ces déplacements, qui sont l’occasion pour eux de passer du temps ensemble. De plus, ils sont les premiers à dire qu’ils préféreront toujours jouer que s’entraîner et le format de cette année, avec deux déplacements d’affilée, semble assez intelligent.

 

Ca fait trop de matchs

 

Dans le « pire » des cas, à savoir l’accession à la finale, la CHL représente, dans sa formule actuelle, 15 matchs au total (donc 7 - 8 en cas de finale à domicile – aux Vernets). Nier que cela est conséquent serait d’une mauvaise foi crasse. Pourtant, avec le format actuel, les 4 matchs du tour préliminaire se déroulent… avant le début de la saison, donc remplacent les traditionnels matchs amicaux. Evidemment, la CHL ne se joue pas sur le même rythme qu’un match amical, mais je ne suis pas convaincu que ces 4 matchs pèsent lourd dans la balance physique en fin de saison. De plus, ils nous permettent en théorie d’être plus affutés en début de championnat, car déjà dans le rythme par rapport aux autres. Après, il est extrêmement délicat de mesurer précisément les impacts de ces matchs sur notre forme physique de fin de saison. L’année passée, on a aussi payé de jouer la Spengler ET la CHL (on verra si Davos en paie le prix fort en fin de saison).

 

J’ai l’impression que la CHL souffre surtout du manque de place que l’on veut bien lui faire. On se plaint de sa présence, mais qu’en est-il des 6 matchs supplémentaires que l’on dispute en championnat ? Je ne vais pas en faire le procès aujourd’hui car ça mériterait presque un article dédié, mais ces « derbys » supplémentaires amènent certes un petit pécule supplémentaire dans les caisses des clubs (et on sait bien qu’il s’agit là du nerf de la guerre), mais ont surtout tendance à banaliser ces derbys, qui perdent en saveur au fil des années (avis très personnel, je le conçois).

 

Peut-être que leur suppression, parallèlement à une meilleure mise en vitrine de la Coupe de Suisse – dont on peut aussi discuter de sa raison d’être - en évitant de la disputer le lendemain d’un match de championnat par exemple, allègerait un peu le calendrier et permettraient aux clubs disputant la CHL de pouvoir s’y consacrer pleinement même durant la saison.

 

Cela ferait toujours quelques matchs de plus (pour autant que le parcours des équipes suisses la disputant soit plus brillant que ces deux premières saisons), mais nous serions dans des proportions plus acceptables que même votre conjoint(e), qui se plaint déjà que vous n’êtes jamais à la maison, pourrait tolérer

 

Ça fait mal au porte-monnaie

 

Difficile de réellement contrer cet argument. Pour certaines personnes, l’abonnement annuel aux Vernets représente un véritable investissement et il serait malhonnête de leur jeter la pierre lorsqu’elles ne souhaitent pas encore payer des billets en plus pour la CHL. Néanmoins, l’effort du club sur ce point est admirable et les prix pour cette compétition restent très abordables. Le club a bien compris que pour remplir les Vernets en août contre ces fameuses « équipes inconnues », il fallait faire preuve de bon sens et offrir des billets bon marché. Dans la situation actuelle, ces potentiels 8 matchs supplémentaires peuvent en effet être problématiques financièrement parlant et, je me répète, il serait odieux de critiquer ceux qui ne peuvent pas se permettre de payer une facture supplémentaire.

 

Par contre, si je continue sur ma lancée du point précédent, pourquoi ne pas imaginer (dans l’improbable éventualité où les 6 matchs supplémentaires disparaîtraient) que l’abonnement reste au même prix, ou en légère diminution/adaptation vu que l’on perdrait des matchs « Premium » pour les remplacer par des matchs « normaux », mais inclue les matchs de CHL (pour autant qu’on soit qualifiés) et de Coupe ? Proposition que l’abonné pourrait refuser si vraiment la CHL ne le botte pas. Mais on est là dans le trop improbable pour que l’on s’y attarde plus longuement.

 

Ça commence trop tôt

 

Il faut bien avouer que le hockey mi-août quand il fait 33°, ce n’est pas le top. Même en tant que fervent défenseur de la CHL, je suis obligé de l’admettre.

 

Même si le championnat suisse devait revoir son calendrier, il faudrait que tous les autres championnats en fassent de même pour que ces dates soient modifiées, ce qui ne semble pas réalisable, du moins à court terme. Difficile donc d’envisager que le premier tour de CHL se dispute à un autre moment qu’en période dite de préparation.

 

Disons que le seul argument que je vois, c’est que pour reprendre contact avec le hockey, la CHL est un bien meilleur moyen de le faire que les matchs amicaux.

 

Cette coupe n’a pas d’histoire

 

Cet argument me fait penser au jeune qui cherche du boulot et à qui on dit « qu’il n’a pas d’expérience ». Ce à quoi le jeune a instantanément envie de répondre « Si personne me donne la chance d’en acquérir, je fais comment, connard ? ».

 

Plus sérieusement, évidemment que cette coupe n’a pas d’histoire. Mais l’histoire, ça s’écrit, ça ne s’invente pas. Si cette compétition va au-delà des 3 premières saisons, elle commencera à prendre son petit stylo BIC et à écrire son journal intime. Mais condamner une nouvelle compétition avec un argument pareil, c’est un peu comme jeter un nouveau-né contre un mur sous prétexte qu’il ne sait pas parler.

 

Financièrement, ce n’est pas une affaire

 

C’est parfaitement vrai. Selon ce qu’on peut lire ou entendre, une victoire en CHL suffirait juste à couvrir les frais qu’elle a engendrés (déplacements, hôtels). Mais cela semble plutôt être un problème pour les clubs que pour leurs supporters. En quoi notre motivation à aller au match est-elle induite par la somme que le club va toucher au bout ?

 

Evidemment, pour les clubs, c’est plus problématique. Néanmoins, les Russes étant hors du coup, il ne fallait pas s’attendre à ce qu’une compétition naissante se voit sponsorisée à coup de millions dès le début. Par contre, si la formule prend, il n’est pas utopique que des sponsors plus gros que Cramo (qui connaissait cette société avant la CHL ?) investissent au terme des 3 premières années pilote, et de faite rendent la compétition plus intéressante financièrement.

 

Ça ne vaut pas la Champions League de football

 

Ah, les comparaisons avec le foot ! J’adore ça.

 

Donc pour les adeptes de cet argument, vous essayez de nous faire croire que la plus prestigieuse compétition de clubs tous sports confondus est plus réputée qu’une nouvelle compétition comme la CHL ? Vous êtes de vrais visionnaires !

 

Il apparaît déjà difficile, voire impossible, de comparer le foot et le hockey. Le premier est le sport numéro 1 dans le monde alors que le hockey est pratiqué certes dans de plus en plus de pays, mais n’atteint pas la moitié de la notoriété du foot à l’échelle mondiale.

 

S’inspirer de la Champions League paraît être une bonne idée pour la CHL, car la structure même de la compétition a des similitudes avec son équivalent footballistique. Mais la comparaison doit s’arrêter là.

 

Il y a trop d’équipes

 

Il faut bien comprendre que la présence d’autant d’équipes dans la phase initiale de la CHL était une nécessité. En voulant créer une compétition rassemblant tous les clubs d’Europe (la KHL est un cas à part, j’y reviendrai), l’IIHF se devait de faire en sorte que tous les pays se sentent concernés. Si tel n’avait pas été le cas, la CHL aurait dès le départ été une compétition élitiste, snobant les « petits pays », ce qui lui aurait été préjudiciable.

 

La question se pose maintenant pour la période allant au-delà des 3 ans que la CHL s’est donné pour évoluer : doit-on réduire le nombre d’équipes ? Pour ma part, je pense que oui ; la présence de 7 ou 8 clubs de pays aussi forts soient-ils que la Suède ou la Finlande me paraît excessive.

 

Le nombre idéal ? Difficile à dire, mais 32 me semble correct. Je serais partisan d’une formule avec le champion et le vainqueur de la saison régulière de tous les pays y participant (12 actuellement), ce qui porterait le nombre à 24. Si le champion est le vainqueur de la saison régulière, le second de la saison régulière serait qualifié (histoire de donner un véritable intérêt à la seconde place).

 

Afin d’amener ce nombre d’équipes à 32, on pourrait imaginer que la 2ème place (ou la 3ème en fonction de ce qui précède) de la saison régulière des 8 meilleurs championnats selon le classement IIHF soit qualificative. Cette formule permettrait de conserver des représentants de toutes ligues tout en offrant au pays « forts » une place supplémentaire. On aurait alors 8 groupes de 4, puis matchs à élimination directe dès les 1/8èmes de finale, ce qui porterait le nombre maximum de matchs à 13.

 

Ce format aurait comme inconvénient de perdre quelques matchs à élimination directe, alors que la CHL en a volontairement ajouté cette saison, mais me paraîtrait plus homogène que l’actuel.

 

Ces clubs fondateurs sont une blague

 

Il s’agissait également d’un mal nécessaire pour avoir un montant de base permettant de créer cette compétition mais aussi pour s’assurer de la présence, durant 3 ans, de clubs moteurs pour sa promotion. Le problème néanmoins, c’est qu’on a l’impression que parmi ces clubs créateurs, certains ont été assez bêtes pour payer leur droit d’entrée tout en jouant la compétition sur un demi-patin (bien que cette notion ne soit que pure interprétation).

 

Bien sûr que ça piquait de voir Fribourg, brillant participant aux playout l’an passé mais qualifié cette saison en CHL, ou Berne dans le même cas la saison précédente. Mais ces clubs fondateurs n’existeront plus au-delà de la saison prochaine, et le modus de qualification sera donc bien meilleur.

 

Il manque les équipes de KHL

 

C’est évidemment le gros manque de cette compétition : comment la rendre crédible alors qu’elle ne compte aucun représentant de la meilleure ligue européenne ? Puisque certains ont besoin de la comparaison avec le foot, est-il envisageable de voir la Champions League se dérouler sans les clubs espagnols (par exemple) ? Bon notez que, pour revenir au hockey, certains arrivent bien à s’emballer devant des Mondiaux durant lesquels les grosses équipes viennent avec leur équipe C, puis B pour enfin finir avec une B+, donc bon…

 

La CHL aurait tout à gagner à voir les clubs de KHL la rejoindre, c’est une évidence. Maintenant, cette absence rend-elle la CHL inintéressante pour autant ? Je ne le pense pas, on a pu voir que le niveau est tout à fait correct même en leur absence.

 

Il n’en demeure pas moins que la CHL gagnerait en crédibilité et trouvant un terrain d’entente avec la Ligue russe. Aux dernières nouvelles, la partie semble malheureusement bien mal engagée. Maintenant, voyons le côté positif : leur absence nous évite qu’un gros sponsor lâche la compétition  sous prétexte que ce n’est pas une équipe russe qui est sacrée.

 

Il y a des clubs de "petits" pays qui y participent

 

On vient de se faire sortir par un club norvégien, pays que l’on ne considérait certainement pas comme un foudre de guerre avant nos deux défaites. Ça devrait aider ceux qui pensent ça à relativiser ce terme de « petits pays ». Et comme dit plus haut, il est indispensable de joindre ces pays réputés plus faible à une compétition continentale.

 

De plus, malgré la réputation des clubs provenant de ces pays dits faibles, on constate que cette saison, seuls deux clubs terminent la phase de poules avec 0 point. Les Steelers de Sheffield et… Zoug. Et si finalement, comme le sous-entendait mon collègue Brett Regali dans son papier, les faibles n’étaient pas forcément ceux que l’on imagine ?

 

Conclusion

 

Vous l’aurez compris, je pense que cette compétition a tout à fait lieu d’exister, sous réserve de certains ajustements nécessaires au terme des 3 ans « probatoires ». Et encore, j’ai évité de parler du plaisir extrême de traverser l’Europe pour voir jouer notre équipe.

 

Longue vie donc à cette CHL !