Goran Bezina, défenseur et capitaine historique de GE Servette, s’apprête à enfiler le maillot des Aigles pour la première fois depuis son exil à Zagreb.
Goran Bezina revient «à la maison» juste avant les play-off, soit au moment de la saison où GE Servette aura le plus besoin de son charisme, leadership et impact physique. Et peu importe si le burger à son nom a été rayé de la carte du «McSorley’s Pub», s’il n’a pas (encore) récupéré sa place fétiche dans le vestiaire ni son statut de capitaine. On n’efface pas aussi facilement douze saisons: le patron, c’est encore lui, même s’il s’en défend (à demi-mot).
Vous venez de disputer (hier) votre premier entraînement avec GE Servette. Vos coéquipiers vous ont-ils chambré en vous voyant débarquer à la patinoire?
Chambré?… Pff! Vous voulez qu’ils me disent quoi? Je ne suis parti que six mois, ce n’est rien.
Et Chris McSorley, était-il heureux de vous retrouver?
(Il rigole.) Oui. Enfin, ça allait, je crois. Il faudrait lui poser la question!
Avez-vous récupéré votre ancienne place dans le vestiaire, là où vous avez été assis durant vos 12 saisons passées au club?
Non, elle est occupée par Eliot Antonietti. Moi, je suis dans le petit vestiaire, juste à côté. Mais cela m’est égal, je ne suis pas compliqué pour ce genre de choses. Je reviens à Genève, mais ce n’est plus le Goran d’avant (sic). Je ne suis pas ici pour prendre la place du capitaine ou de quiconque. Je ne revendique rien. En fait, cela fait du bien d’avoir un autre rôle, avec un peu moins de pression…
Revenir jouer à Genève, sérieusement, vous pensiez que cela serait encore possible?
Non, vraiment pas. En tout cas pas aussi rapidement. Dans ma tête, je partais pour deux ans. Revenir ici après six mois, je ne l’aurais jamais imaginé.
D’autant plus que votre départ avait été assez… douloureux, n’est-ce pas?
Oui, cela s’était terminé en queue de poisson. Cela ne s’était pas fait de la façon qui était prévue. Ce n’est pas un secret, les deux dernières saisons à Genève n’ont pas été évidentes. Mais voilà, je suis revenu, c’est cool. (Il marque une pause.) Je pense que Chris (ndlr: McSorley) a vu que je manquais un petit peu… À vrai dire, cette séparation nous a fait du bien à tous les deux.
Avez-vous reçu des offres d’autres clubs suisses?
J’ai parlé avec d’autres équipes de LNA, mais je ne crois pas que je serais allé ailleurs qu’à Genève. Ici, je suis à la maison, tout est beaucoup plus simple.
À quand remontent les premiers contacts avec GE Servette?
Ils ont eu lieu assez rapidement, en début de saison déjà. Puis j’ai reparlé avec Hugh Quennec avant Noël. Il y avait beaucoup de blessés à GE Servette… Mais moi, je me plaisais beaucoup à Zagreb et j’ai tout de suite signifié que je ne voulais pas rentrer. Je jouais beaucoup, en supériorité et en infériorité numérique, j’étais tout le temps sur la glace. 25, 30 minutes par match, c’était presque trop, mais je prenais mon pied. J’étais bien.
Partir en KHL à 36 ans, ce n’était pas un pari gagné d’avance, n’est-ce pas?
J’ai pu prouver que je pouvais encore jouer un rôle important au plus haut niveau, et cela m’a fait du bien. J’ai vécu autre chose et j’ai adoré ça. Une autre ville, un autre championnat, un autre style de jeu aussi. Les joueurs sont plus lourds en KHL qu’en LNA, mais le jeu est plus technique et il y a beaucoup moins de charges. Je m’attendais pourtant au pire en arrivant là-bas. Bon, au Medvescak Zagreb, nous étions un peu une équipe de «malades» et les adversaires ne prenaient pas le risque de nous provoquer.
Votre rôle risque pourtant de changer désormais avec GE Servette. À quoi vous attendez-vous?
J’aurais moins de temps de jeu, je ne jouerai pas sur le power play, j’en suis conscient…
Vous n’êtes pas du genre à rester en retrait. Est-ce difficile d’accepter un rôle moins en vue?
Oui, bien sûr, c’est dur. Je joue mieux lorsque je suis à fond dans le match. Mais on m’a expliqué quel serait mon rôle. Si je ne l’avais pas accepté, je serais resté à Zagreb.
Vous restez malgré tout le leader de cette équipe, même si d’autres ont pris le relais sur la glace…
Je connais les gars, je connais Chris, je sais comment ça se passe dans ce club. Je vais amener tout ce que je peux dans le vestiaire et aider le groupe grâce à mon expérience et mon vécu. Sur la glace, je n’aurai plus autant d’influence qu’à l’époque. J’ai déjà joué 55 matches cette saison, j’ai les adducteurs qui sifflent. (Il sourit.) J’aurai aussi besoin d’un temps d’adaptation. Le jeu en KHL, sur des surfaces souvent plus petites, comme celles de NHL, est complètement différent. Il ne faut pas s’attendre à des miracles, mais je sais que je peux apporter quelque chose de précieux à l’équipe en termes de leadership et de présence physique.
Quels sont vos projets pour la saison prochaine?
J’ai un contrat valable avec Zagreb pour la saison 2017-2018. On verra comment la situation évolue là-bas, si les dirigeants parviennent à réunir le budget nécessaire pour que le club reste en KHL. Mais on verra aussi ce qui se passe à Genève. Tout reste ouvert.
Premier match à l’extérieur, ce soir à Bienne, loin des Vernets. Une bonne chose?
C’est mieux… Un derby à domicile contre Fribourg pour commencer? Cela aurait fait un peu beaucoup, je crois. Mais j’ai hâte de retrouver les Vernets dimanche.
Vos adieux, l’an dernier, avaient été très émotionnels. Les retrouvailles risquent d’être encore plus poignantes!
(Il soupire.) Je sais… Je sais très bien à quoi m’attendre… Je suis impatient.