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Roland Rivera, lun 19/09/2016 - 18:01

Si je recevais un franc à chaque fois qu’un journaliste ou un supporter déclare que « ce n’est pas le moment de prendre un but » je serais un riche oisif, arpentant le lobby des 5 étoiles et ne voyageant qu’en première classe.

 

Il y a tellement d’occasions de le dire que la bonne question à se poser serait plutôt de déterminer quel est bon moment pour prendre un but, parce qu’à l’image du ying et du yang, des bornes plus et moins, l’un ne va pas sans son alter ego et si il doit y a des mauvais moment, il doit y en avoir des bons aussi.

 

Comme postulat je suggère que nous considérions un score avec un écart nul ou faible, parce qu’il est clair que quand on mène 8-0, ou que l’on est en déficit de 5 buts, les éléments du dossier sont différents.

 

D’emblée je propose  également de considérer que les prolongations sont le pire moment pour encaisser un but, puisque les possibilités de se remettre d’un but dans ce contexte mobilisent des forces surnaturelles, des failles spatiotemporelles, voire des syndromes d’oubli collectif qui sont pour le moins aléatoires.

 

Ensuite, nous pouvons éliminer les 10 dernières minutes du match qui, sans être aussi désastreuses que les prolongations, restent éminemment  délicates, nos adversaires sans foi ni loi n’hésiteront pas à pratiquer un catenaccio spécialement crispant à affronter.  Chacun sait que dans ces circonstances, l’horloge tourne plus vite, et même plus vite encore quand nos adversaires ont la maitrise du puck.

 

Il est généralement admis que les premières minutes de chaque tiers, disons les 3 premières …et les ultimes minutes des deux premiers tiers, là aussi nous en retiendrons 3, sont inopportunes pour concéder un but.

 

Enfin il y a les périodes circonstancielles, les supériorités numériques sont extrêmement rageantes tout comme les 3 minutes suivant un but des aigles…quand le journaliste nous sert, là encore, un poncif bien moisi, le fameux « tout est à refaire » souvent associé à ce « mauvais moment » qui fait l’objet de l’analyse du jour.

 

Ces constatations établies, et sur un match de 65 minutes au maximum, il subsiste, hors périodes circonstancielles,  35 minutes pendant lesquelles il serait tolérable d’encaisser un but. En soustrayant  les périodes évoquées ci-dessus, sur la base des statistiques 2015-2016, il ne reste plus que 11 minutes pendant lesquelles un but encaissé ne devrait pas déclencher la fameuse maxime.

 

Après, comme supporter ou partisan pour les Québécois, rien n’est plus déplaisant que d’encaisser un but…et cela même si les aigles mènent 40-0. C’est rageant pour le goalie qui est privé d’un blanchissage, ça remet en cause tout un schéma tactique, ça crée  une insécurité donc une angoisse…

 

La conclusion est donc que techniquement il y a une dizaine de minutes par match pendant lesquelles on pourrait supporter, sous l’effet conjugué d’une large gamme d’euphorisants décontractants, tels que bières et stupéfiants, d’encaisser un but. Mais la réalité c’est que le seul fait qu’il y ait des conditions pour tolérer d’encaisser un but signifie qu’il n’y a pas de bon moment, il n’y a pas de but acceptable, et le prochain qui dira que « ce n’est pas le moment de prendre un but » aura affaire à moi, ou me devra un franc.