En sortant Robert Mayer à la 33e de l’acte IV, le boss des Vernets savait déjà que le duel face au «Z» était plié. Décryptage d’une scène-clé du naufrage (0-8).
Il y a des soirées comme ça. Chris McSorley a vite compris que celle de mardi aux Vernets n’allait déboucher sur rien de bon.
Un blessé à déplorer après dix secondes de jeu (commotion d’Alexandre Picard), un but encaissé 30 secondes plus tard: «Après ça, j’ai senti un niveau d’énergie très faible sur le banc», a avoué le patron des Vernets au Matin.ch .
S’en est suivie une phase durant laquelle GE Servette a tenté de réagir, avant qu’il ne commence à sombrer – 0-2 de Robert Nilsson à la 29e, puis erreur de Robert Mayer sur le 0-3 de la 33e. Le but de trop pour le GSHC et son gardien, retiré de la circulation dans la foulée. Le début d’une fin peu glorieuse (plus large revers de l’histoire du GSHC en play-off).
Protéger son gardien
«Si Chris a poussé un coup de gueule dans le vestiaire, c’est peut-être à la fin du 2e tiers, à 0-4, explique Jan Cadieux, son ancien joueur entre 2003 et 2011. En l’occurrence, je n’en suis pas sûr du tout. Il a sans doute vite senti que ça allait être une longue soirée. En coach intelligent, il a vu son équipe fatiguée. Or Chris sait malgré tout qu’il n’est plus qu’à deux matches d’une finale des play-off. Dans ces situations-là, vous ne pouvez pas taper sur la tête de vos joueurs, au risque de les perdre pour de bon.»
Présent aux Vernets, Gil Montandon a vu ce qui s’y est passé «bien mieux que devant ma télévision». Alors? «C’était une soirée durant laquelle il y avait des signes qui ne trompent pas, dit le futur directeur sportif et entraîneur assistant du HC Viège. Un blessé et un but encaissé après quelques secondes de jeu, puis Kast qui voit un puck lui arriver dans les patins alors qu’il a le but vide devant lui (ndlr: 9e minute de jeu) : quand vous commencez à mettre tout ça bout à bout, tout en constatant que Zurich joue très intelligemment et agresse votre but constamment, vous commencez à vous dire: «Mais comment vais-je faire pour gagner ce match?»
Cette question, Chris McSorley a définitivement arrêté de se la poser quand il a vu Robert Mayer se trouer (33e). «Pour en arriver là, les Genevois avaient déjà dépensé beaucoup d’énergie contre Lugano et lors des trois premiers matches face à Zurich, rappelle Jan Cadieux. La fatigue physique est bien présente. Il convient désormais de préserver celle mentale. C’est primordial pour un gardien. En le sortant, il voulait le protéger, d’autant qu’il a été décisif plusieurs fois ces derniers temps. Il a besoin de lui pour la suite.»
Un avis partagé par Gil Montandon. «Au bout d’un moment, soit vous vous dites que le compte est bon et vous sentez qu’il faut tirer un trait sur le match, soit vous vous époumonez, vous demandez à vos gars de crocher comme des malades pour finir par perdre avec les honneurs. Chris a le hockey à fleur de peau. Il a vu que ça ne valait pas la peine d’insister.»
Au final, quelle que soit l’ampleur de la défaite concédée mardi, c’est 2-2 dans la série. «Bon, ce n’est jamais positif de perdre 8-0», nuance Jan Cadieux. «Quand vous venez d’en ramasser huit dans la caisse, ce n’est pas facile de remettre les patins le jour d’après, enchaîne Gil Montandon. D’autant plus que vous vous dites qu’il faudra aller jouer chez eux et qu’ils vont arriver comme des avions. Cette baffe, même si sa conséquence est comparable à une défaite 1-0, doit quand même provoquer une prise de conscience dans l’équipe.» Sinon…
Reste-t-il des lapins dans le chapeau ? (par Simon Meier)
Chris McSorley, allègre malgré le 0-8 de mardi contre Zurich, en appelle au côté magicien de ses joueurs.
On avait prévu une petite cuillère pour ramasser Chris McSorley hier matin, au lendemain de la plus grande baffe de sa carrière (0-8 à domicile contre les ZSC Lions). Mais nul besoin d’argenterie, le patient se porte apparemment bien: l’entraîneur de GE Servette laisse éclater un rire tonitruant doublé d’un «hello» enjoué à l’autre bout du fil. Pas question de se pendre.
«En 25 ans, j’ai appris quelque chose des play-off: la façon dont tu perds un match n’a aucune importance, déclare l’Ontarien prêt à tout. La seule chose qui compte, c’est qui en gagne quatre dans la série. Si quelqu’un m’avait dit, avant le début de ce duel, qu’on en serait à 2-2 après quatre matches, j’aurais signé le contrat.» Nouvel éclat de rire.
La bonne humeur comme antidote à la rude réalité. GE Servette, dépassé sur la glace, décimé par la succession des chocs (voir ci-dessous), n’a pas bonne mine à l’heure de retourner ce soir au Hallenstadion. Alors Chris McSorley compense. Il donne une lecture, disons positive, de la raclée essuyée face à Zurich: «Je viens de revoir le match à la vidéo et, après le 1er tiers, Genève aurait aussi pu mener 4 ou 5-1. J’étais extrêmement heureux de la façon dont on a joué la première moitié du match.»
Une interprétation contrebalancée par un aveu: «Après le premier goal (ndlr: donc 40 secondes de jeu) , l’équipe n’était pas bien, dit Chris McSorley. Comme elle fonctionne beaucoup à l’émotion, j’ai très vite senti que nous ne serions pas en mesure d’escalader la montagne, qu’il fallait déjà se concentrer sur le match 5.» Le voilà qui se profile.
Chris McSorley: «J’y crois»
GE Servette a-t-il encore le cœur, le souffle nécessaires? «A chaque fois que cette équipe a dû faire face à l’adversité, elle a réussi quelque chose de miraculeux, avance le Canadien. A chaque nouveau problème, mes gars ont trouvé le moyen de sortir un lapin de leur chapeau. J’espère qu’il leur en reste quelques-uns.»
Appel au miracle, clin d’œil à la magie. «J’y crois, reprend McSorley, qui n’allait évidemment pas dire le contraire. A mes yeux, la situation, est rigoureusement identique à celle après la défaite 2-7 contre Lugano, en quart.» Les Aigles font-ils exprès de prendre une «veste» à domicile lors de l’acte IV, histoire d’endormir l’adversaire? «J’adorerais que les gens pensent ça. Mais honnêtement, ce n’est pas une stratégie», s’esclaffe le coach.
On saura ce soir si cette bonne humeur était surjouée; ou si les Genevois ont encore des lapins dans leur chapeau.
Noah Rod rejoint le clan des commotionnés
Les maux de tête s’accentuent aux Vernets, où deux éléments ont rejoint la triste confrérie des commotionnés. Outre Alexandre Picard, touché mardi soir après 10 secondes, Noah Rod aurait, selon Chris McSorley, lui aussi été victime de l’épidémie. Il sera absent – au moins – ce soir au Hallenstadion.